billet juin 2025

Les paroles de Jésus ont beau mettre les disciples en garde, il n’y a rien à faire : de génération en génération, nous nous attachons aux pierres et aux constructions de nos temples ou autres salles paroissiales. Paradoxalement, ce n’est pas parce que nous y sommes farouchement attaché.e.s que nous les entretenons correctement. D’ailleurs nous sommes
aujourd’hui dans une période critique au cours de laquelle beaucoup de conseils presbytéraux constatent les besoins de
travaux après des décennies sans suivi. Ces travaux nécessitent des budgets que les Églises locales n’ont pas (ou n’ont plus). En même temps, les coûts des dégâts par manque d’entretien ont explosé en raison des tarifs d’assurance et surtout du montant des franchises.
Jésus interpelle ses disciples : « tout sera détruit » (Mt 24,2), « prenez garde que personne ne vous égare » (Mt 24,4). La mise en garde est sérieuse et vaut qu’on s’y arrête. Par cet avertissement, Jésus oblige les disciples à détourner leur attention vers des choses plus importantes que les pierres et les belles constructions. Jésus oriente les disciples vers l’essentiel : l’amour-agapé (Mt 24,12) qu’il faut préserver et tenir bon jusqu’à la fin. Jésus énumère les maux de la Terre qui dévastent tout sur leur passage : les guerres, ou leur rumeur, les famines et tremblements de terre, la haine et les trahisons mutuelles, etc. La seule chose qui peut tenir bon, qui préserve l’humain, qui empêche de se laisser égarer, c’est l’amour-agapé, c’est la relation humaine dans laquelle l’autre est reconnu comme aimable, au même titre que je le suis dans le regard de Dieu.
L’avertissement est toujours d’actualité : « prenez garde que personne ne vous égare ». Les pièges changent de nom et de visage, au cours des époques, mais nous y sommes toujours confrontés. Des régimes clairement totalitaires ou ceux qui revendiquent de le devenir imposent une pensée expurgée de mots indésirables. La censure s’insinue partout. Aux États-Unis, le président et son gouvernement s’y emploient en attaquant les universités, les sciences, sous prétexte de lutte contre le wokisme, par exemple.
Si les pierres et des constructions risquent d’être détruites, ce n’est pas là le danger principal dans la vie d’un croyant. « Prenez garde que personne ne vous égare » : le plus important est surtout de préserver l’amour-agapé au cœur de la Bonne Nouvelle du Royaume. La censure et le rejet des autres, différents (l’étranger, les féministes, les gays, etc.), sont des dangers bien plus grands pour la vie humaine qui devient alors plus violente et s’appuie sur les ressorts les plus obscurs du cœur humain, comme le ressentiment et la peur.
Ne nous trompons pas de combat ! Mieux vaut soigner sa liberté de pensée et sa capacité à réfléchir dans la complexité et l’acceptation de la différence que de chercher à préserver des constructions, aussi belles soient elles. Nos lieux de cultes, quelle que soit la structure matérielle qui nous abrite, sont avant tout des lieux où la parole du Christ est proclamée et partagée.
Notre témoignage est là, à soigner, dans l’amour-agapé !
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Anne-Marie Feillens,
présidente du conseil régional de l’EPUdF en Sud-Ouest